Les Catalans se prononcent ce dimanche par referendum pour ou contre le nouveau Statut d'autonomie de leur région. L'objectif: doter la Catalogne, l'une des contrées les plus riches et dynamiques d'Espagne, des meilleures armes pour gérer directement ses affaires et déployer son identité culturelle propre, en mettant notamment en œuvre une politique linguistique qui favorise clairement l'emploi du catalan dans la vie quotidienne et les contacts avec l'administration.
Grâce à ses nouvelles compétences et à l'élargissement de celles qu'elle a déjà, la région pourra ainsi conserver 50% de l'impôt sur le revenu prélevé (contre 30% aujourd'hui) et administrer plus librement la politique d'éducation, d'immigration ou l'organisation du territoire.
«Bon pour la Catalogne, bon pour l'Espagne»
Mai s au-delà de ces strictes applications, le texte a d'autres fonctions. «Il va servir de mesure étalon, pour marquer le degré d'autonomie auquel peuvent aspirer les 16 autres régions du pays face au pouvoir central de Madrid», affirme le leader nationaliste Josep Duran Lleida, qui appelle au Oui, défendant un statut «Bon pour la Catalogne, bon pour l'Espagne». La preuve, dit-il, déjà, l'Andalousie, Valence et les Baleares ont emboîté le pas sur la voie ouverte à Barcelone, et préparé la révision de leur statut.
Le débat est servi: A ce rythme, près de 30 ans après le retour à la démocratie, le pays s'achemine bel et bien vers cette «Espagne plurielle» qui flirte avec le fédéralisme, promise par Zapatero à son élection en 2004. Les socialistes voient là une modernisation nécessaire des institutions, pour bâtir un pays «en phase avec la modernité et l'évolution de la société».
Cette perspective est accueillie avec réticence par l'opposition de droite, qui alerte sans relâche sur la fin de l'unité de l'Espagne et brandit le spectre d'un gouvernement central «vendu aux nationalismes». D'autant que, trois mois après la déclaration de cessez-le-feu de l'ETA au Pays basque, Zapatero s'apprête à solliciter au Parlement l'autorisation d'ouvrir un dialogue avec l'organisation clandestine, afin d'avancer vers un processus de paix. Il n'en faut pas plus pour alimenter la rumeur de «pactes secrets» avec les extrémistes.
Réticence de la droite
Le nouveau ’Estatut catalan'arrive donc au jour de son référendum dans une ambiance incertaine. Le spectacle, des mois durant, des négociations tortueuses entre Madrid et Barcelone lors de la rédaction du texte n'a pas aidé à clarifier la situation. La surenchère entre partis, accaparant le débat politique espagnol jusqu'à la saturation, a douché quelques enthousiasmes. «On part sur de grands débats pour savoir si oui ou non la Catalogne est une nation, et on finit par se quereller sur des questions de péages d'autoroute, c'est vrai qu'il y a quelque chose d'absurde», reconnaît volontiers en privé un député socialiste de Barcelone.
Résultat: un semi-fiasco. Le texte, qui devait faire le consensus, est jugé suffisant par la gauche indépendantiste qui appelle à voter «Non», ce dimanche, tout comme le PP à droite, mais pour des raisons diamétralement opposées. Au passage, la coalition de gouvernement régional a implosé en vol. Pire encore, le nouveau statut suscite l'indifférence des Catalans, qui au début de la campagne penchaient largement vers l'abstention selon les sondages. Aujourd'hui, le Oui semble donné gagnant, mais cela ne suffit pas. Ses partisans (socialistes et nationalistes de CiU) se sont activement mobilisés ces derniers jours pour raviver la flamme et attirer aux urnes les indécis. Ils en appellent au légendaire «bon sens» catalan pour éviter une trop grande abstention.
sources : 24heures.ch